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SECTEUR COURANT DU MANUEL > TEDI - Transformations des États démocratiques industrialisés > Jérôme VALLUY    

Chapitre - Comparaisons internationales d’États-providence

Dans le contexte européen de la fin du XIXe siècle, l’émergence de la protection sociale est tardive par rapport à l’Allemagne et à la Grande-Bretagne. Les premières lois marquantes apparaissent près de 15 ans après les lois de Bismarck et plusieurs années après les lois britanniques. Cette « lenteur » française va se prolonger au début du XXe siècle puisqu’il faudra attendre 1930 pour qu’un système national de protection sociale soit réellement instauré et ceci après une décennie de discussion autour de la loi 1930 dont le projet fut déposé au parlement en 1921 !

L’analyse en termes de « régimes d’État-providence », notamment telle qu’elle est conduite par Gosta Esping-Andersen implique une définition large de l’État-providence. Le régime d’État-providence fait référence à un ensemble d’interventions étatiques qui entraînent une démarchandisation des salariés, une redistribution des ressources et une modification de la structure sociale. Elle permet de faire ressortir des modèles assez différents qui décrivent chacun la situation de nombreux pays.

Une autre démarche pour mettre en évidence la diversité des trajectoires nationales de l’État-providence consiste à étudier des cas nationaux d’évolution historique. On tend alors souvent à se focaliser sur le système de protection social lui-même, objet plus circonscrit et plus précis que l’interventionnisme économique et social dans sa globalité. Une socio-histoire de la genèse de systèmes de protection sociale nationaux complète utilement la précédente démarche : elle présente l’avantage de faire découvrir dans les processus concrets de formation des États-providence et l’inconvénient de reposer sur une définition restreinte de l’État-providence.

  • Section - Trois régimes d’État-providence (Esping-Andersen)
  • Section - La diversité des trajectoires nationales (cas de la protection sociale)

    L’analyse en termes de « régimes d’État-providence », notamment telle qu’elle est conduite par Gosta Esping-Andersen, implique une définition large de l’État-providence.
    Le régime d’Etat-providence fait référence à un ensemble d’interventions étatiques qui entraînent, une démarchandisation des salariés, une redistribution des ressources et une modification de la structure sociale. Elle permet de faire ressortir des modèles assez différents qui décrivent chacun la situation de nombreux pays.

    Une autre démarche pour mettre en évidence la diversité des trajectoires nationales de l’État-providence consiste à étudier des cas nationaux d’évolution historique. On tend alors souvent à se focaliser sur le système de protection social lui-même, objet plus circonscrit et plus précis que l’interventionnisme économique et social dans sa globalité. Une socio-histoire de la genèse de systèmes de protection sociale nationaux complète utilement la précédente démarche : elle présente l’avantage de faire découvrir dans les processus concrets de formation des États-providence (mais présente l’inconvénient de reposer sur une définition restreinte de l’État-providence).

    • Sous-section - Allemagne, France (régime conservateur-corporatiste)

      Un deuxième type de régime regroupe les nations telles que l’Autriche, la France, l’Allemagne et l’Italie. Ici, l’héritage historique corporatiste a été amélioré pour s’adapter à la nouvelle structure de classe postindustrielle. Dans ces États-providence conservateurs et fortement « corporatistes », l’obsession libérale de rendement du marché et de la marchandisation n’est jamais prééminente. En tant que tel, l’octroi de droits sociaux n’est jamais un fait sérieusement contesté. Le maintien des différences de statut prédomine. Les droits sont par conséquent liés à la classe et au statut. Ce corporatisme est subordonné à un édifice étatique parfaitement prêt à se substituer au marché en tant que pourvoyeur de bien-être. L’assurance privée et les indemnités liées au travail jouent vraiment un rôle marginal. D’autre part, la pression de l’État pour maintenir les différences de statut signifie que son impact de répartition est négligeable. Mais les régimes corporatistes sont également modelés par l’Église et, par là même, fortement liés à la préservation des valeurs familiales traditionnelles. L’assurance sociale exclut, d’une manière caractéristique les épouses ne travaillant pas. Les allocations familiales encouragent la maternité. Garderies et services familiaux similaires sont visiblement sous-développés. Le principe de services « subsidiaires » sert à bien montrer que l’État n’intervient que lorsque la famille a épuisé toutes ses ressources en matière d’aide à ses membres.

    • Sous-section - Grande-Bretagne, États-Unis (régime libéral)

      Dans un groupe nous trouvons l’État-providence “libéral”, dans lequel l’assistance fondée sur l’évaluation des besoins, les transferts universels modestes ou les plans d’assurances sociales modestes prédominent. Les indemnités sont attribuées principalement aux bas revenus, généralement des ouvriers dépendants de l’adide publique. Dans ce modèle, le progrès de la réforme sociale a été rigoureusement borné par les normes traditionnelles, libérales, de l’éthique ouvrière : celui où les limites du bien-être équivalent à la propension marginale à opter pour le bien-être plutôt que pour le travail. Les règles de droit sont donc strictes souvent associées à des stigmates. Les indemnités sont très modestes. L’État encourage le marché, passivement, en ne garantissant que le minimum, ou activement en subventionnant les projets privés de prévoyance. Il en résulte que ce type de régime minimise les effets de la démarchandisation, enferme effectivement le monde des droits sociaux et érige un ordre de stratification dont les éléments sont une égalité relative (de pauvreté) parmi les bénéficiaires de l’État-providence, une protection sociale de marché différenciée parmi les majorités et un dualisme politique de classe entre les deux catégories. Les États-Unis, le Canada et l’Australie sont les exemples archétypiques de ce modèle.

      On observe qu’Esping-Andersen ne classe pas la Grande-Bretagne parmi les exemples archétypiques de modèle. Le rattachement de ce pays au modèle libéral vient essentiellement de son faible score sur l’échelle de la démarchandisation et des évolutions qu’il a connu ces dernières décennies, affaiblissant le rôle de l’État en ce qui concerne la stratification sociale.

    • Sous-section - Suède (régime social-démocrate)