Cette distinction est conceptuelle. On trouve rarement ces trois types de domination légitime à l’état pur dans la réalité. Ces différents types peuvent se combiner. Ainsi, l’Empire napoléonien combine des éléments des trois types : la dimension charismatique est importante (glorification de la personne de l’empereur), les éléments rationnels-légaux sont également très présents — on connaît l’importance du droit et de l’administration à cette époque. Enfin, les éléments traditionnels ne sont pas absents, comme le montre la tentative de constitution d’une dynastie.
Des trois formes de domination légitime, une seule a à peu près disparue des systèmes politiques occidentaux : la domination traditionnelle. La tradition perdure certes sous certaines formes dans le régime constitutionnel du Royaume-Uni ou dans les interstices des règles constitutionnelles d’autres pays. Mais d’une manière générale, la référence au passé, à ce qui s’est toujours fait, a perdu de sa valeur justificatrice de ce qui est fait ou doit l’être. La domination charismatique en revanche peut toujours réapparaître, même si c’est de manière ponctuelle : le pouvoir dévolu au général de Gaulle en 1958 peut être rapproché de la forme de domination légitime. Surtout, les ressorts de cette légitimité sont toujours sollicités par les leaders politiques pour asseoir leur autorité personnelle, soit au sein d’un parti ou d’une coalition, soit au poste électif qu’ils ont obtenu. Mais de manière générale, la domination légitime est aujourd’hui, dans nos pays, de type légal-rationnel.
Jérôme VALLUY‚ « Segment - Conclusion »‚ in Transformations des États démocratiques industrialisés - TEDI - Version au 9 mars 2023‚ identifiant de la publication au format Web : 382